Je suis toujours naturelle

Je n'ai pas grandi d'un pouce depuis les premiers jours de janvier dernier. Mes soirs sont une torture, mes journées un délicat enfer. Pourtant, j'ai des roses qui poussent sur mes seins, du lierre qui s'agrippe à mon cou comme un collier sauvage. Je suis une fille-plante au ventre rempli d'eau de lilas. Chaque matin, l'aube dépose sur mes cheveux ses gouttes de rosée, et je me sens rajeunir. J'ai cessé de punir mon corps pour sa faiblesse ; à présent, je me laisse aspirer par la terre. La vie n'est pas plus facile, le monde pas moins appréciable, rien n'a changé à l'exception de ma chair. Je suis la preuve vivante de l'évolution. Je refuse d'être mise en pot : je suis libre et mes racines vagabondent de prairies en forêts.